On se connaissait de vue pour avoir fréquenté le même club de brasseurs amateurs, mais on ne s’était jamais vraiment adressé la parole jusqu’à ce soir-là. Ça s’est passé dans un bar miteux de centre-sud, le genre où le monde de notre âge va pour fêter un enterrement de vie de garçon en buvant des shooters de tequila cheap plongés dans une bud lite. Moi, j’étais là pour l’enterrement de vie de garçon de mon cousin. Lui, il était juste là. Je pense qu’il avait pleuré. Il avait les yeux rouges et bouffis et il marmonnait à répétition : « j’suis un pas bon, j’suis un pas bon ». Une bien triste affaire. C’est un mélange de pitié et de dégoût qui m’a poussé à aller lui parler. Il était au bout d’une vertigineuse spirale descendante qui l’avait mené des hautes sphères de la critique littéraire institutionnelle à une job de nuit au salaire minimum dans une brasserie. « Ma vie est brisée… la bière est mon unique réconfort », qu’il me disait. Moi, comme vous savez, la bière, ça m’intéressait beaucoup, alors je lui ai dit : « Viens-là, mon ami, toi et moi, on va se partir en affaires, et on va être BIG ». J’aime penser que je l’ai réparé, Shawn, ce soir-là.
Et c’est de cette rencontre qu’est née, deux ans plus tard, Avant-Garde Artisans Brasseurs, entreprise brassicole qui explore principalement les styles européens et l’affinage en barriques de chêne.
De nos échecs, nous sommes ressortis résilients, forts et beaux. Après avoir donné en sous-traitance la production de nos deux marques de bières et pris d’assaut les tablettes des dépanneurs du Québec, nous avons, dès l'an de grâce 2019, assumé la pleine responsabilité de notre devenir. Vous passerez nous voir.